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L’émotion gouverne l’émeute… et ce n’est pas un hasard si ces deux mots partagent les mêmes racines étymologiques.

Watts en 1965, Johannesburg en 1970, New York en 1977, Los Angeles en 1992, les banlieues parisiennes en 2005, récemment Londres, Athènes, Dublin, Sydney, Vancouver, Detroit…les centres des grandes métropoles connaissent régulièrement, certains diront « de plus en plus régulièrement », des émeutes.

Pillages, agressions, incendies volontaires, ludisme, vols et meurtres sont des risques omniprésents lors d’une émeute ou d’une manifestation.

Si l’urbanisation est de plus en plus visible, de plus en plus imposée par nos modes de vie, ne pas être pris au dépourvu et pouvoir gérer intelligemment une émeute doit, dès lors, impérativement faire partie de la préparation du citoyen-citadin.

Cet article est une collaboration entre Vol West (« Le Survivaliste ») & Guillaume Morel (« PROTEGOR »).

 

I – Les causes d’une émeute
ou comprendre l’origine des émeutes

Les causes pouvant provoquer une émeute sont extrêmement complexes et variées. De plus, il n’est pas rare de voir plusieurs paramètres nourrir l’événement, comme par exemple l’instabilité politique d’une région, couplé d’un manque chronique de nourriture par exemple. Même si les composantes d’une émeute sont complexes, voici les 6 causes qui nous paraissent majeures dans la genèse d’une émeute.

  • L’idée

L’idée fait souvent partie des causes pouvant déclencher des manifestations et des émeutes. Celle-ci peut être sociale, politique, économique, territoriale ou encore religieuse. Elle peut opposer, soutenir, dénoncer, radicaliser, approuver, unifier, rassembler ou encore provoquer. Qu’il soit question d’une manifestation d’étudiant à Paris ou d’une manifestation politisée au G5 comme nous l’avons vu a Vancouver, l’idée précède souvent le geste.

  • L’instabilité

L’instabilité inhérente et continue de la fabrique sociale, politique, ou encore économique d’un pays ou d’une région, est souvent la cause d’un malaise pouvant rapidement conduire la population à l’émeute voir la rébellion et la guerre civile.

  • L’oppression

L’oppression, et que nous approchions celle-ci d’un point de vu marxiste, humaniste ou identitaire, conduit souvent le groupe oppressé à un besoin de soulèvement plus ou moins prononcé.

  • Le manque

Le manque chronique, c’est a dire la pauvreté au sens large; pauvreté des sols, des ressources, du travail, de la sécurité…ou la pénurie, c’est a dire le manque parfois abrupt de ressources vitales comme l’eau, la nourriture et l’énergie, est une situation extrêmement délicate et capable de déclencher d’importants troubles civils.

  • La victoire

La victoire (et part conséquent la défaite) comme lors de rencontres sportives par exemple, peut rapidement transformer tout un quartier en véritable champs de bataille.

  • L’injustice

L’injustice aura été l’une des causes principales des émeutes de Los Angeles en 1992, lorsque les policiers accusés de brutalité envers Rodney King ont été acquittés.

II – Les types d’émeutes
ou comprendre les formes que peuvent prendre une émeute

Les risques & besoins de préparation pour une manifestation de 100 employés de PME un dimanche après-midi, ou pour une guérilla révolutionnaire pouvant durer quelques mois, ne sont évidemment pas les mêmes. Faute de place, nous ne pourrons moduler précisément nos conseils pour chaque type d’émeute, mais il reste bon d’avoir en tête la variété de typologies (par danger croissant) :

  • Petites manifestations « pacifiques » (e.g. manifestation des employés d’une PME)
  • Grandes manifestations « pacifiques » (e.g. manifestation syndicale à Paris)
  • Actions écologiques (e.g. blocage d’un convoi de déchets nucléaires et/ou ludisme)
  • Fêtes, moments d’euphorie (e.g. 1e janvier, victoire sportive)
  • Manifestations « qui dégénèrent » (e.g. manifestation étudiante)
  • Soulèvements communautaires locaux (e.g. soulèvement d’une banlieue suite à un fait divers)
  • Emeutes soudaines qui s’étendent (e.g. émeutes de Londres)
  • Guérilla urbaine (e.g. dans certains pays africains)

Chaque typologie a aussi ses propres particularités :

  • Niveau d’encadrement & déroulement (manifestation déclarée auprès de la préfecture, avec un parcours connu vs. émeutes dispersées et imprévues)
  • Taille & localisation (rue, centre ville, ville, agglomération, région, etc.)
  • Timing & durée (manifestations de jour aux heures de travail vs. troubles nocturnes, manifestation planifiée sur une journée vs. soulèvement de plusieurs jours/semaines/mois)
  • Niveau de violence & intensité (une manifestation « pacifique » qui dégénère à cause d’un petit groupe de casseurs reste souvent moins violente qu’un soulèvement populaire causé par une instabilité politique chronique)

Il s’agira donc d’adapter intelligemment sa préparation et son niveau d’alerte au type de manifestation et/ou d’émeute rencontrée.

 

III – Les dangers pendant une émeute
ou comprendre les risques que nous encourons

Pour mettre en place une méthode de gestion des risques en cas d’émeutes, partons d’une analyse des dangers possibles. Dans le cas d’une émeute, les risques que nous encourons sont les suivants :

a – Agressions de masse

L’un des dangers les plus sérieux en cas d’émeute est d’être pris à partie par un groupe d’émeutiers souhaitant précisément vous faire du mal. Cela peut être dû à de nombreuses raisons (une appartenance à une communauté qu’ils n’aiment pas, une image proche des éléments qu’ils contestent – comme par exemple un signe de richesse dans un contexte de crise économique, du pur racket, etc.). L’entrain de l’effet de groupe est particulièrement dangereux car il amoindrit la sensation de responsabilité de chaque individu, qui peut alors révéler sa « haine » plus violemment qu’il ne le ferait seul.

b – Agressions individuelles

Les émeutes récentes de Londres, et en France les manifestations étudiantes, ont bien montré la présence de casseurs en bande (cas d’agressions en bande, cf. ci-dessus) mais aussi de prédateurs individuels repérant & attaquant une cible en marge de la foule, souvent pour du racket (vol de portable/argent). Une manifestation crée en effet un moment de « non-droit », avec une impression de risque moindre que la police n’intervienne (car occupée à autre chose, car dépassée par les événements, etc.), et permet à certains agresseurs de s’exprimer. S’ils sont armés, ils hésiteront moins à utiliser leur arme que dans un contexte « normal ». Ces agressions individuelles sont motivées par les raisons habituelles (les 3V : vol, viol, violence).

 

 

Sur cette vidéo qui a pas mal tourné pendant les émeutes de Londres, ce jeune a connu violence, puis vol. Une autre vidéo édifiante ici.

 


c – Mouvements de foule

Dans une manifestation, une action soudaine peut déclencher un mouvement de foule imprévisible. Cela a conduit à de nombreuses blessures graves et parfois de décès par piétinement, de personnes qui n’ont pu garder leur équilibre. Cela peut aussi séparer votre groupe (voir §. i – Proche égaré)

d – Gaz lacrymogènes

Dans un contexte de manifestation ou d’émeute, il y a des forces de l’ordre et des gaz lacrymogènes. Ce risque est moins dangereux que les précédents, les gaz lacrymogènes ne créant généralement pas de lésions graves ou mortelles. Cela reste un danger indirect, car les gaz lacrymogènes affaiblissent, rendant temporairement aveugle & peu mobile, donc plus facilement à risque face à tous les autres dangers qui peuvent surgir. A noter aussi qu’il n’y a pas que les forces de l’ordre qui ont des gaz lacrymogènes… une manifestation est souvent une occasion pour beaucoup de sortir leur bombe OC personnelle. C’est l’une des armes privilégiées des agresseurs en bande.

e –Rixes avec les forces de sécurité

Même si l’on ne prend pas part à la manifestation ou émeute, la seule présence dans la zone nous met à risque par rapport aux interventions des forces de sécurité (qui ne peuvent pas toujours distinguer simplement manifestants/émeutiers & passants). Au programme, les risques comprennent alors : coups de matraque/tonfa, menottage, plaquage au sol, coup/poussée de boucliers, électrisation par taser, tir de flashball, tir de munitions diverses (gaz, etc. … et balles !).

f – Cocktails Molotov & feux divers

Le cocktail Molotov, la grenade du peuple, est une arme incendiaire inhérente aux émeutes. Le risque de cette bouteille remplie d’un mélange d’essences réside à la fois dans la surprise du projectile que dans l’étendue des flammes qu’il répand quand il se brise. Au-delà des cocktails Molotov, le feu est aussi un risque courant, que ce soit les voitures mises à feu, les magasins, etc.

g – Bris de verre

Vitrines cassées, voitures vandalisées, abris bus explosés, projectiles dans les fenêtres des habitations… les raisons d’être exposés à des éclats de verre (et donc à des coupures plus ou moins sérieuses) ne sont pas rares dans une manifestation.

h – Projectiles perdus

Pierres, pavés, briques, éléments de mobilier urbain, cocktail Molotov, projectiles de munitions diverses… les projectiles peuvent survenir de toute part, avec une dangerosité très variable, mais surtout une forte imprévisibilité.

i – Proche égaré

Que ce soit à cause d’un mouvement de foule, d’un événement qui provoque une réaction rapide non synchronisée ou d’un moment d’inattention, … c’est pendant les manifestations et a fortiori les émeutes qu’il est fréquent de voir des personnes chercher leurs enfants, leurs conjoints ou leurs amis. Cela peut être sans conséquence (quand la manifestation est pacifique et que chacun connait la ville), mais peut rapidement devenir un facteur d’accroissement de risque.

 

IV – Règle n°1 : éviter l’émeute
ou garder à l’esprit les fondamentaux de la sécurité personnelle

Il y a un principe clé qui marche vraiment toujours… le meilleur moyen d’éviter un danger est de ne pas être là quand il arrive. En sécurité personnelle, cela veut dire anticiper, éviter, fuir. Dans le cas particulier des manifestations & émeutes, la première règle de sécurité personnelle est donc tout simplement de ne pas y être. Cela implique :

  • Se tenir informé de ce qu’il se passe dans sa ville de résidence ou (pas aussi évident) dans la ville où l’on voyage, pour savoir si un risque d’émeute est en cours, et le cas échéant, sa localisation
  • Rester chez soi en sécurité quand on sait qu’il y a une manifestation dans une rue proche. Verrouiller la porte, fermer les volets, et se tenir informé.

NB : Evacuer le domicile peut cependant être parfois nécessaire si l’émeute prend de l’ampleur et menace directement votre domicile. Lors des émeutes de Los Angeles par exemple, certains quartiers furent complètement dévastés. Dans une telle situation, évacuer & fuir non seulement notre domicile, mais aussi notre quartier (peut être notre ville) est la solution. La mise en place d’un plan d’évacuation, c’est-à-dire une ligne de conduite et certaines préparations établies en amont, peut largement améliorer l’efficacité de l’évacuation, en particulier :

  • Prévoir 2 ou 3 lieux de replis familiers (le domicile d’un ami ou d’un parent, une maison de campagne, un terrain de camping ou un hôtel préféré) en dehors des grandes villes. Cela permet de s’assurer d’un point de chute psychologiquement/physiquement stable/sain pour votre famille en cas d’émeutes prolongées. Ces points de chutes, s’ils sont déterminés à l’avance, peuvent aussi être d’excellents points de ralliement au cas où votre famille aurait été séparée durant l’évacuation
  • Prévoir un sac d’évacuation avec un minimum de ressources vitales et d’outils pour toute la famille: eau, nourriture, trousse de premiers soins, argent liquide, cartes routières, etc.
  • Ne pas prendre part à une manifestation, émeute… cela peut aller à l’encontre d’une conviction, il peut y avoir des idées pour lesquelles vous avez envie de manifester. Soyez alors juste conscient des risques que vous prenez, et si vos idées méritent de prendre ses risques, soyez préparés (voir la suite de l’article) ; mais la recommandation fondamentale reste : « éviter les manifestations ! »
  • Si vous êtes surpris par une manifestation, l’éviter rapidement. Les rues à proximité d’une manifestation/émeute sont souvent des zones propices aux agressions individuelles, les agresseurs profitant du calme régnant généralement du fait de la coupure des transports autour de la manifestation. La prise de conscience et décision de partir doivent donc être rapide & efficace, avec des les techniques habituelles de sécurité personnelle (attention à son environnement, ne pas ressembler à une victime, mode orange, etc.)

V – Se préparer à une émeute
ou comment s’équiper et anticiper

Même si le meilleur moyen de ne pas être confronté aux dangers inhérents à l’émeute est d’éviter celle-ci, il peut y avoir des situations où nous ne pouvons faire autrement :

  • Peut-être que nous sommes au travail, et que nous devons rejoindre notre famille sans pouvoir éviter l’émeute ou la manifestation
  • Peut-être que nous sommes à la maison, et que nous avons une urgence nous obligeant à sortir (urgence médicale, familiale, aller chercher les enfants a l’école, etc.)
  • Peut-être que l’émeute vient tout simplement à nous, comme cela a été le cas à Londres par exemple, ou bon nombre de foyers et de commerces ont été attaqués, vandalisés et/ou incendiés

Le renforcement du domicile

Si votre domicile est directement attaqué ou s’il est indirectement menacé (incendies, projectiles etc.), et que l’évacuation n’est pas possible, le durcissement de celui-ci est alors une démarche permettant de gérer certains risques.

a) Avant les troubles

  • Faire un plan d’évacuation et de conduite à tenir pendant une situation d’urgence permet la cohésion et l’action. Ne pas avoir de plan invite à la panique
  • Prévoir des réserves de nourriture et d’eau par exemple, nous permet de pouvoir laisser s’essouffler certains troubles tout en restant sain et sauf à la maison. Il n’est pas question durant des affrontements violents de sortir dans la rue pour aller chercher de la nourriture au petit épicier du coin… d’ailleurs, celui-ci sera fermé, ou dans le pire des cas vandalisé ou détruit. Prévoyez au minimum 72 heures d’autonomie en eau et en nourriture, mais aussi quelques outils :
    • Extincteur d’incendie portatif pour les feux de classes A,B, et C (ces extincteurs sont les plus polyvalents et les plus vendus)
    • 2 ou 3 rouleaux de ruban adhésif solide
    • 1 radio à pile (+ piles) ou dynamo
    • 1 paire de gants solides pour chaque membre de la famille
    • 1 lampe torche puissante (minimum 100 lumens) + piles
    • 1 kit de premiers soins complet
    • Faire un inventaire précis et documenté (photos / vidéos / numéros de série) de vos biens sera extrêmement important en cas de vol ou de perte. Cette inventaire peut être déposé sur plusieurs supports de stockage amovible (clé USB), et ces clés devraient être gardées a plusieurs endroits différents; coffre fort a la maison, coffre en banque, le domicile d’un parent etc.

b) Pendant les troubles

  • La pause de ruban adhésif sur les fenêtres est un moyen expéditif de minimiser les dangers inhérents à l’explosion des vitres. Le renforcement ou le blocage des points d’entrés à l’aide de meubles par exemple, peuvent dramatiquement réduire les risques d’effractions ; il est bien évidemment totalement exclu de regarder l’émeute à découvert depuis son balcon
  • Le risque d’incendie, direct ou indirect, reste le principal danger. Remplir votre baignoire d’eau, préparer des couvertures et/ou des serviettes de bain en les mouillant, retirer les rideaux des fenêtres et toute autre matière inflammable proche de celles-ci (canapé, chaise, etc.), fermer les volets et sécuriser notre extincteur d’incendie, sont autant de gestes pouvant minimiser les dégâts et faciliter l’évacuation ou le retranchement en cas d’incendie

Une émeute est en cours et nous devons sortir… que prendre avec soi ?

Notre priorité ici devrait être la protection personnelle et la minimisation des risques, c’est donc une approche défensive que nous devons adopter, et non une approche offensive :

  • Une paire de gants solides offrant le plus de protection et de dextérité possible
  • Une tenue vestimentaire adaptée :
    NB : principalement éviter les matières inflammables comme le polyester par exemple. Si vous n’avez pas de vêtement anti-feu à proprement parler (comme le Nomex ou Drifire), des vêtements en coton feront très bien l’affaire

    • Chaussures solides et confortables
    • Pantalons (blue jean)
    • Manches longues (plusieurs couches de vêtements en coton/Drifire/Nomex pour les plus “pro” peuvent fortement aider à minimiser les brûlures
    • Blouson épais (cuir/Nomex/Barbour)
    • Globalement, préférer des couleurs sombres permet d’éviter de « ressortir » de la foule (quand on est le plus visible d’un groupe, on est une cible plus évidente)

Capuche or not capuche, that is the question !

La capuche, symbole vestimentaire de la manifestation et de l’émeute, offre des avantages et des inconvénients.

La capuche offre des avantages certains :

  • Protection de la tête, des oreilles et du cou contre les projectiles et les attaques
  • Protection de notre identité en présence des caméras (il ne s’agit pas ici de se cacher pour pouvoir commettre des méfaits, mais d’éviter aussi d’être filmé par des bandes ou d’éviter de mauvaises interprétations d’une bande vidéo par la justice)
  • Mouillée (vous devriez maintenant avoir une bouteille d’eau sur vous), elle protège des brûlures pouvant être occasionnées par un cocktail Molotov par exemple

Mais la capuche a aussi certains désavantages qu’il nous faut souligner, le plus important étant le symbolisme et l’étiquetage socio-culturel qu’elle représente. Aux Etats-Unis, l’affaire Trayvon Martin, le cas d’un jeune tué par un milicien qui fonde sa défense en grande partie sur le fait que la victime portait une capuche, fait prendre conscience des risques :

  • Les forces de l’ordre peuvent vous confondre avec un émeutier ou un casseur, et vous risquez d’augmenter vos chances d’être interpellé, gazé ou physiquement engagé
  • Les autres groupes/individus présents lors d’une émeute peuvent aussi faire un amalgame, et donc une erreur de jugement, sur le simple port de ce vêtement

Ceci étant dit, la capuche reste un système intéressant car nous pouvons l’avoir, et la revêtir ou pas selon la situation.


    • Un sac à dos peut être extrêmement pratique pour transporter un haut de rechange (au cas où celui porté soit contaminé par du gaz lacrymogène par exemple), quelques barres chocolatés, une bouteille d’eau et une trousse de premiers soins par exemple… Si nous rajoutons un livre assez grand et épais dans celui-ci, ou encore une feuille de Plexiglas anti-effraction entourée de duct-tape, il nous offre une très bonne protection du dos contre d’éventuelles attaques, ou encore contre certains projectiles comme les pierres et les balles en caoutchouc
    • Un autre livre (ou une autre feuille de Plexiglas) plus petit peut être placé sur le devant de notre corps, dans la ceinture, pour nous protéger l’abdomen
    • Une paires de bouchons anti-bruits : le niveau sonore élevée lors d’une manifestation peut à lui seul être extrêmement déstabilisant, irritant voire douloureux
    • Un système de protection pour les voies respiratoires tel qu’un masque anti-poussière ou un bandana par exemple ne sont pas des systèmes optimaux, mais ils peuvent réduire les troubles associés à la présence de particules ou de gaz dans l’air (les plus pro/équipés prendront un masque à gaz)
    • Une paire de lunette de protection peut être un excellent moyen de prévenir une blessure aux yeux

  • Une trousse de premiers soins, même minimaliste, peut faire la différence :
    • 2 paires de gants en Nitrile pour la protection personnelle en cas d’administration de soins sur une tierce personne
    • 1 éponge hémostatique type « QuikClot » ou “Uriel”
    • 2 compresses stériles de 10cm x 10cm
    • 1 bande simple pour maintenir une compresse
    • 1 marqueur indélébile pour pouvoir relayer une information concernant la victime
    • 1 flacon de décontaminant (type « BioShield », « Cool-it », « Sudecon »), soit une solution ou une compresse humide applicable sur le visage capable de neutraliser et/ou de prévenir les effets des sprays lacrymogènes
    • 1 couverture de survie
    • 1 pommade pour le traitement des brûlures
    • Une bouteille d’eau, de préférence d’au moins 1L, pour l’hydratation mais aussi pour la décontamination du visage et des yeux si nous avons été exposés à certaines substances
    • Un parapluie solide, si les conditions atmosphériques le permettent, peut être un excellent outil lors d’une manifestation. Généralement perçu comme inoffensif, le parapluie est capable d’une multitude d’actions et d’influences sur notre environnement immédiat
    • Nos portables sont généralement greffés à nos oreilles. Cependant, le réseau peut être saturé ou compromis si l’événement est important. Dans cette optique, avoir un jeu de talkie-walkie peut être pertinent (cf risque « proche égaré »)
    • Notre kit administratif traditionnel (papiers, argent, carte bleue, photos de la famille, permis de conduire…) et nos objets personnels devraient refléter la situation
      • L’utilisation d’un faux portefeuille avec une vielle CB périmée et quelques billets de banque par exemple, peut être un bon moyen de négocier une situation de racket
      • Une autre précaution peut être de ne prendre avec soi que le strict minimum (a minima un peu de cash pour un éventuel taxi), et d’avoir des photocopies de nos papiers important plutôt que les originaux
      • Nos bijoux; bagues, chaines, gourmettes, montres et boucles d’oreilles…devraient rester à la maison !
VI – Faire face à l’émeute
ou comment se protéger dans une émeute ?

Pendant la manifestation ou émeute, ce sont les principes classiques de la sécurité personnelle qu’il faut appliquer, sachant qu’il convient de rester en niveau de vigilance haut (orange selon le code de couleurs de Cooper). Cela est d’ailleurs éprouvant (et va donc naturellement vous encourager à fuir).

En reprenant méthodologiquement chaque danger identifié ci-dessus, voici une liste de conseils qui nous apparaît pertinent pour optimiser la gestion des risques pendant une manifestation ou émeute.

Notez cependant que le premier principe clé de « environment awareness » (être conscient de son environnement, faire attention à ce qu’il se passe autour, repérer les personnes qui gravitent dans votre périmètre) est la base de la plupart de ces conseils.

a – agressions de masse

  • Identifier les groupes fonctionnant ensemble
  • Eviter les situations d’encerclement
  • Penser « issus » (où/comment fuir si besoin)
  • Se rapprocher des forces de sécurité

Si un groupe vous a approché, la désescalade est plus difficile qu’en situation normale… essayez de fuir, au pire donnez vos biens. Si le groupe est violent et la fuite impossible, 2 options :

  • Engager le combat avec soit le leader, soit celui qui bloque l’issue permettant la fuite la plus efficace, ou
  • Se protéger la tête et attendre que ça passe (position fœtale au sol) ; c’est la pire situation

Notez aussi que la voiture n’est pas un lieu de protection sûre pendant une émeute ; c’est même au contraire souvent la cible des attaques en masse. Certains se souviendront de la conductrice quasiment lynchée pour avoir « foncé » sur la foule un 1e janvier à Paris.

b – agressions individuelles

  • Garder un accessoire de défense (porte-clés, bombe OC, kubotan, lampe métallique, etc.) dans la main ou à accès très rapide
  • En 1-to-1, tenter de désescalader la situation en adoptant une attitude de « prédateur non arrogant »… l’idée est en effet de ne pas paraître pour une victime afin que l’agresseur (qui a un grand choix dans un tel contexte) change de cible, sans pour autant jouer sur l’ego de l’agresseur ; le sentiment à faire passer sans le verbaliser ainsi c’est « ok c’est toi le plus fort (j’accepte de m’abaisser un peu en ne faisant pas le malin et en évitant toute réplique agressive) mais si tu continues, je me laisserai pas faire »
  • Si besoin, frapper et courir (surtout ne pas s’acharner, ne pas chercher de vengeance, l’unique objectif est de fuir le danger)
  • Si vous êtes avec un proche sous votre protection (e.g. petite amie), il faut lui avoir précédemment appris comment réagir dans un tel cas (ne pas renchérir, se taire, se mettre en retrait, se préparer à courir)

c – mouvements de foule

  • Essayer de vous positionner près des murs, plutôt qu’au milieu des rues. Les mouvements de foule s’apparente à de la mécanique des fluides. Les parois sur les bords freinent le fluide (ici la masse de personnes)… le mouvement ira donc moins vite sur les bords
  • S’accrocher à son/ses proches
  • S’accrocher éventuellement à un inconnu
  • L’objectif premier est d’éviter de tomber. Un peu comme dans une baïne, si vous arrivez à vous laisser porter sans lutter, vous arriverez à rejoindre une zone moins en mouvement
  • Et si vous tombez… accrochez tout ce que vous pouvez pour vous remettre sur pied, hurlez pour attirer l’attention de ceux qui vous piétine (ils essaieront peut être de vous éviter), et au pire des cas, comme pour les agressions de masse, mettez-vous en position fœtale en protégeant vos organes vitaux avec les membres (mains/poings autour de la tête et de l’arrière du cou, coudes le long des côtes pour protéger l’accès à l’abdomen, genoux recroquevillés pour protéger l’accès aux parties génitales)

d – gaz lacrymogènes (ou autres)

  • Si vous avez du produit décontaminant, mettez-en sur votre visage dès qu’il y a soupçon de présence de lacrymogène (les décontaminants peuvent souvent s’appliquer en prévention) : dès que vous sentez un quelconque picotement sur la langue ou le visage, dès que vous voyez de la fumée au loin, dès que vous entendez des tirs, etc.
    Mettez aussi en place votre masque ou foulard
  • En cas de contamination,
    • Essayez de vous isoler à l’écart dans un endroit où il y a peu de chance d’être trouvé (un hall d’immeuble…)
    • Ecartez les vêtements aspergés (gants, foulard, capuche, blouson…), ils peuvent vous re-contaminer… si vous avez des vêtements de rechange, c’est le moment, sinon à vous de voir quels vêtements vous pouvez retirer, ou retourner (si cela ne conduit à amener la zone contaminée à même votre peau bien sûr !)
    • Evitez de vous frotter les yeux ou le visage, cela aiderait à étendre le produit chimique ; plus globalement, ne paniquez pas (facile à dire 🙂 mais c’est souvent dans la panique que l’on se frotte partout et que l’on étale le produit sur tout le visage), et essayez de contrôler votre respiration
    • N’hésitez pas à cracher, vous mouchez… il faut expulser le produit au maximum
    • Rincez à l’eau vos mains & zones non sensibles abondamment. Pour les zones sensibles, certains affirment qu’il ne faut pas mettre d’eau (que cela ne fait qu’aider à étendre le produit). Tout dépend de la quantité d’eau que vous avez avec vous. Si vous avez accès à un robinet, vous pouvez essayer de vous laver abondamment le visage (et les cheveux). Si vous avez du savon, c’est mieux. L’idéal reste d’appliquer du décontaminant

e – rixes avec les forces de sécurité

Les forces de sécurité peuvent intervenir de différentes manières dans une manifestation. Elles peuvent charger en masse comme un bataillon de romains de l’antiquité (nos fameux CRS), elles peuvent charger en commando (petit groupe qui vise 1 individu ou 1 petit groupe d’individu précisément), elles peuvent alpaguer (dans certains pays en moto ou à cheval), elles peuvent infiltrer (les manifestations « grouillent » de policiers en civils qui interviennent sur un flag’).

Dans tous les cas, vous n’avez a priori rien à vous reprocher (sinon vous n’avez rien à faire sur cet article !), toutefois le tumulte de l’émeute peut créer des doutes ayant pour conséquence que les forces de l’ordre « embarquent » tout le monde sans se poser de question (pour faire le tri plus tard). Eviter ce calvaire reste motivant, et ce :

  • En sachant quand il faut se rapprocher des forces de sécurité (elles peuvent vous éviter une agression) et quand il ne faut pas (quand ces forces sont sous tension d’un groupe et qu’elles sont prêtes à riposter « large », sans distinction (jet à eau, gaz, charges massives))
  • En obéissant à toute injonction d’une autorité en uniforme
  • Et dans le cas bien particulier d’émeutes idéologiques, en connaissant la position de ces forces de sécurité par rapport à ce que vous représentez

f – cocktails Molotov & feux divers

Les cocktails Molotov présentent les risques des projectiles (la surprise) et du feu expansif. Dans le cas où vous êtes touché par un cocktail Molotov, c’est-à-dire par le liquide enflammé qu’il répand, il faut éteindre la zone enflammée en se roulant par terre et/ou en la couvrant par un tissu (non inflammable, d’où l’intérêt de vêtements en coton et pas en polyester). A choisir (dans le temps imparti) entre un sol dur (bitume, béton) et un sol terreux ou poussiéreux, le second type est plus efficace. Après avoir éteint la zone, et dans le cas où les pompiers ne vous prennent pas en charge immédiatement, il faut chercher à refroidir la plaie (qui « brûle » toujours), en faisant couler de l’eau dessus longuement. Ces conseils s’appliquent aux brûlures d’autres feux.

g – bris de verre

Limiter les risques de coupures s’obtient par la protection maximale des parties de son corps (plusieurs couches de vêtements, foulard pour le cou, capuche pour la tête). Si une coupure survient, il faut appliquer idéalement une compresse hémostatique (sinon un vêtement propre) sur la plaie. Si un morceau de verre (ou autre) reste dans la plaie, il ne faut pas l’extraire (cela sera fait plus tard par les médecins), généralement il bloque le sang. S’il ne bloque pas le sang, il faut tout de même stopper l’hémorragie : appuyer dessus quand même si cela n’aggrave pas la coupure (cela dépend des cas), soit faire un garrot avec un « tourniquet » ou tout simplement une ceinture. Ce dernier cas n’est plus recommandé en secourisme civil car peut présenter des risques au retrait. Si vous décidez d’appliquer un garrot, notez l’heure précise de la pose (idéalement au feutre sur la peau à côté) et ne le retirez pas vous-même

h – projectiles perdus

Comme pour les bris de verre, les projectiles s’évitent :

  • En étant conscient de son environnement (avoir remarqué le premier projectile envoyé et la zone d’où il provenait, pour se protéger de cette zone, et s’en éloigner rapidement)
  • En couvrant un maximum les zones de son corps (manches longues, pas de short, foulard, capuche), et en ayant plusieurs couches de vêtements (pour l’épaisseur protectrice)
  • En évitant d’être « à découvert » (au milieu d’une zone sans obstacle) et en recherchant les lieux où les dangers ne peuvent pas venir de toutes parts
    NB : en longeant un mur, il faut faire attention à ce qui peut être jeté d’une fenêtre dudit mûr… (l’exemple d’un seau d’eau jeté par une fenêtre un soir de 14 juillet à Paris dans une rue bondée, arrivé sur un couple à 10m devant moi, m’a pas mal marqué)

i – proche égaré

Dans le cas d’une séparation avec un proche, la première action est évidemment de tenter une télécommunication avec lui (mobile, talkie si vous étiez équipé). Si cette solution fonctionne, convenez d’un lieu de retrouvaille bien connu des deux (il est donc important de valider plusieurs fois mutuellement les détails de ce lieu pour éviter tout malentendu), éloigné de la manifestation (moins il y a de monde, plus ce sera simple).

S’il n’est pas possible de joindre ce proche (enfant, réseau mobile coupé, mobile perdu, etc.), et qu’aucun lieu de ralliement n’a été discuté précédemment, il n’y a pas beaucoup de solution. Si le proche est un enfant, il est possible de tenter une recherche en spirale autour de la zone de séparation, en espérant qu’il ait décidé de rester où il était (idéalement quelque chose qu’il faut expliquer aux enfants : « si tu es perdu et ne me vois plus, reste à l’endroit où tu es, debout, ne te cache pas »).

 

VII – Survivre à l’émeute
ou comment gérer l’après-émeute ?

Nous avons échappé à l’émeute. Mais ce n’est pas fini, il faut désormais gérer :

  • Le soin des éventuelles blessures (pompiers, hôpital, médecin) ; dans une émeute méchante, les hôpitaux peuvent être débordés, selon la gravité de la blessure il peut être pertinent de chercher un hôpital plus excentré, moins « populaire »
  • La réparation des éventuels dégâts ou vols (assurance, justice). Dans une émeute, beaucoup de gens sont témoins des méfaits commis. Certains filment d’ailleurs, les policiers les premiers. Il peut être intéressant d’avoir une micro-caméra avec soi qui tourne (c’est très abordable). Après le cas de la dénonciation de pose, et l’exemple des émeutes de Londres avec l’appel à la délation qui suivit est intéressant. En France, nous avons un cas de conscience historique à dénoncer. Pas de conseil à donner sur ce sujet, cela relève du principe personnel : on peut souhaiter de ne pas dénoncer pour éviter des représailles, ou bien de le faire par acte citoyen et volonté de justice
  • Le choc psychologique éventuel ; ce sujet est souvent oublié, mais les images d’une personne se faisant agresser par un groupe (la vidéo plus haut par exemple), d’une personne qui brûle sous un cocktail Molotov, d’un représentant de la sécurité commettant une bavure… tout cela laisse des traces (des peurs, du stress, une « haine », etc.). Il est important d’en prendre conscience et d’avoir plan pour calmer cela : en parler à des proches et/ou à un psychologue

En espérant que cet article collaboratif entre nos blogs vous aura plu, nous pouvons conclure que si vous avec lu entièrement cet article, c’est que vous êtes déjà dans le bon état d’esprit pour faire face à une émeute. Procurez-vous les éventuels quelques matériels cités que vous n’auriez pas, discutez agressions & point de ralliement avec vos proches, et surtout, toujours, faites attention à votre environnement !

Guillaume & Vol West

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