Cela faisait des années que je croisais des adeptes du SMA dans des stages, et que je me disais qu’il fallait que j’en fasse un focus sur protegor. Voici chose faite grâce à Dimitri Careil, instructeur SMA au club49 Babylone.

Qu’est-ce que la méthode SMA ?
Dimitri Careil : La S.M.A. (Stratégie et Maîtrise d’Adversaires) est une discipline de conception moderne mais d’inspiration ancienne. Nous avons conscience que nous n’avons rien inventé au niveau technique, nous avons repris tout ce qui marche dans les arts martiaux dits traditionnels (percussions, moyens de contrôle, travail au sol, moyens de force intermédiaire). Ce qui nous différencie des autres méthodes, qu’elles soient anciennes ou modernes, c’est notre approche. En effet nous considérons qu’il est hasardeux d’apprendre ou d’enseigner une discipline de self-défense sans connaître et respecter le cadre légal de notre pays (entre autres l’article 122-5 du code pénal). De nombreuses personnes s’interrogent sur le « pendant » d’une action résultant d’une agression. Ainsi de nombreuses techniques sont mises en place en laissant de côté les « principes stratégiques et moteurs ». Nous constatons donc que le facteur « avant » et « après » est souvent négligé. Nous nous attachons donc à analyser une situation avant d’agir (anticipation) et quand vient le moment de « ré-agir » nous nous efforçons d’adapter nos ripostes aux obligations légales. Cette réflexion est à l’origine du mot « Stratégie » que nous utilisons dans l’appellation de notre école. Il y a un proverbe qui dit mieux vaut être jugé par 9 que porté par 6… nous considérons pour autant qu’il révèle une vision très réductrice de la self-défense (parfois même irresponsable vis à vis des pratiquants). Il est tout à fait possible de défendre efficacement sa vie sans risquer sa liberté. Il est donc indubitable qu’une préparation cohérente doit prendre en compte les 3 temps d’une situation de crise . C’est ce que nous essayons de faire avec nos élèves.
– L’avant en favorisant l’ouverture d’esprit, la prise en compte de l’environnement et la gestion des agressions verbales.
– Le pendant en travaillant sur le stress et en fournissant un ensemble de techniques afin que chacun puisse se constituer SA boîte à outils correspondant à SA forme de corps.
– L’après en donnant des conseils sur les suites judiciaires à donner, mais aussi sur la responsabilité de la victime ayant réagit face a un agresseur étant par voie de conséquence légalement « sous sa responsabilité ».
La discipline S.M.A. évolue au sein de la Fédération de Muaythaï et Disciplines Associées et comporte deux orientations. Une orientation sportive et une orientation professionnelle. Le contenu de formation initiale a permis de structurer les formations professionnelles dispensées dans l’Armée de Terre (TIOR), la Gendarmerie Nationale (IP), l’Armée de l’Air (TAD) et ainsi que certaines unités de police nationale et polices des transports (GTPI). Pour parler de la pratique sportive, je peux vous citer la 1e place qu’a obtenue un de nos instructeurs (Frédéric MARTIN, 3e degré SMA) lors de la compétition King Of Self Defense en catégorie master 1 lors de la 4ème édition à Fismes… Mais au-delà des compétitions, la pratique de la S.M.A. permet à chaque pratiquant de se dépenser et de développer son adaptabilité devant de nombreuses situations et évidement « in fine » de sentir bien dans sa peau.

Fabrice Halopeau, fondateur de la méthode SMA

Qui a créé la méthode SMA ?
Dimitri Careil : Le concepteur de la S.M.A est Fabrice HALOPEAU. Il est sous officier de Gendarmerie et a servi entre autre au GIGN et aussi Groupe d’Intervention de Guyane. Il a réalisé un programme technique basé sur son expérience du terrain et des interventions à hauts risques. Toutes les techniques ont été expérimentées sur le terrain dans des conditions réelles. Il est également membre de l’Association Internationale de Tactique de Police pour laquelle il réalise de nombreuses formations.

Qui peut pratiquer la S.M.A. ?
Dimitri Careil : La S.M.A. est accessible à tout le monde, que vous soyez un homme ou une femme, jeune ou moins jeune, civil ou professionnel chacun peut y trouver un intérêt. Que vous souhaitiez apprendre à vous défendre dans une société de moins en moins sûre et de plus en plus violente ou simplement perfectionner vos connaissances en arts martiaux, vous pouvez vous inscrire dans un club S.M.A. près de chez vous ou contacter M. HALOPEAU via son site « Combat Training System » pour connaître les modalités afin d’ouvrir une structure S.M.A.. Certains clubs comme le Club49 Babylone (Paris) proposent également des cours de self-défense aux adolescents.

Quels grands principes enseignez-vous en SMA ?
Dimitri Careil : Parmi les principes enseignés en S.M.A., nous pouvons en citer 3 qui sont d’après moi les plus importants :
– Respect du cadre légal. Trop de disciplines enseignent des techniques certes efficaces mais qui risquent d’envoyer les élèves s’expliquer devant la justice. La légitime défense ne permet pas de faire n’importe quoi !
– L’anticipation. Si nous nous retrouvons dans une situation dégradée, c’est que nous sommes probablement « passé à côté de quelque chose ». Il est nécessaire d’avoir constamment nos sens en éveil. Ce n’est pas de la paranoïa, celle ci est incontrôlée et est une pathologie. Nous recherchons radicalement le contraire. Il est important d’être en mesure de se contrôler ainsi que son environnement avant de vouloir contrôler un adversaire. Je peux faire un parallèle avec la codification internationale comportant plusieurs couleurs (gradation des états de vigilance). En outre, ce n’est pas un hasard que la discipline Stratégie et Maitrise d’Adversaire comporte 5 ceintures (blanc, jaune, orange, rouge et noir).
– L’adaptation. Qualité d’analyse nécessaire afin d’adapter une réponse face à telle ou telle situation. Ainsi, les différents modes d’action des « adversaires » sont intégrés afin de s’y préparer. Nous pratiquons donc aussi le pied/poing, le travail au sol. Rien n’est fait sans une permanente remise en question, pratiquant comme instructeur.

Comment abordez-vous l’utilisation d’accessoires de défense ?
Dimitri Careil : Bien qu’il existe de très nombreux accessoires, nous nous efforçons de sensibiliser nos élèves à l’utilisation d’objets de la vie courante. Tout le monde n’a pas forcément les moyens de s’équiper en matériels spécifiques mais tout le monde a un sac, un porte-clefs, un parapluie, un journal, un téléphone portable… En fait nous essayons d’utiliser notre environnement à notre avantage. Je résumerai cela en un mot : Adaptabilité. La SMA ayant une origine professionnelle dans le monde de la sécurité, elle comporte un volet spécifique dans lequel est enseigné l’utilisation et la réglementation du bâton de protection télescopique ainsi que du tonfa. Bien évidement, cette partie est réservé aux « hommes en uniformes ». Pour autant, tous ces principes sont adaptables à l’aide d’objet usuels, comme détaillé supra.

Une position d'attention

Comment abordez-vous les mises en situation & l’approche de cas réalistes à l’entraînement ?
La problématique d’une discipline de self-défense est l’approche de la réalité et du stress dans un cadre aseptisé comme peut l’être celui du dojo. Sans jamais perdre de vue que la discipline reste un moyen somme toute de se faire plaisir et de partager, nous nous efforçons d’intégrer ces paramètres régulièrement dans certains exercices de notre entrainement. Une situation devient réaliste bien souvent plus dans l’effet de surprise ou dans le manque d’anticipation que dans la force des frappes. Le mode d’entrainement prend sa source sur 3 pôles : Mental, Physique et Technique. Je m’explique, d’un point de vue physique nous allons mettre nos élèves face à plusieurs adversaires en intégrant des protections pour éviter des blessures inutiles et nous allons leurs présenter des cas concrets à partir desquels nous allons construire une réflexion qui nous amènera à une réponse efficace. C’est là que réside la force et la légitimité de la S.M.A., toutes les techniques enseignées ont été testées sur le terrain par des professionnels. Du point de vue psychologique, nous allons recréer du stress (de manière artificielle si j’ose dire) tout en augmentant la fréquence cardiaque des pratiquants afin qu’elle soit la plus proche possible de celle que nous aurions lors d’une agression. Il est alors aisé de prendre la mesure du travail nécessaire chez un pratiquant de SMA. Dans un dojo il est facile de réagir à une menace déterminée mais dès que le stress (même artificiel) apparaît c’est une autre histoire. C’est la raison pour laquelle même l’échauffement n’est pas fait au hasard. Par delà son utilité de préparer le corps et les articulations à l’intensité d’un cours, nous y intégrons des facteurs d’attentions devant être pris en compte par chaque élèves. Nous échauffons le corps, l’esprit et développons l’attention.

Si vous aviez un premier conseil à donner à une personne qui cherche à apprendre à se défendre, lequel serait-il ?
Dans le domaine de la self-défense, il faut faire preuve d’humilité. On ne peut jamais connaître l’issue d’une confrontation à l’avance. C’est pour cela que le premier conseil que nous donnons aux personnes désirant apprendre à se défendre est d’éviter les situations potentiellement dangereuses pour son intégrité physique ou celle de ses proches. Facile à dire… quand notre société nous pousse à marcher le nez dans l’écran de notre téléphone portable ou le casque de notre MP3 sur les oreilles. Alors levez la tête et réapprenez à regarder autour de vous. Ne perdez pas votre temps à vous interroger sur l’efficacité de telles ou telles techniques telle ou telle école, en général elles le sont toutes. Ouvrez plutôt votre esprit à votre environnement, la première technique en S.M.A. c’est l’ANALYSE d’une situation. De cette analyse découle l’anticipation des situations, par la connaissance du milieu dans lequel nous évoluons mais aussi ses règles d’actions (sociales et légales). On nous parle souvent de combat sans règles, mais celles-ci reviennent comme un cheval au galop devant une cours de justice. Je vous rappelle que « Nul n’est censé ignorer la loi ». J’en terminerai avec un adage bien connu : « On n’a rien sans rien ! » C’est à force de pratique et d’efforts que l’on progresse… « Avec rien au départ, on a rien à l’arrivée ! »

Merci Dimitri !
Merci de nous avoir accordé ces quelques lignes pour présenter notre discipline, la S.M.A. Dimitri CAREIL – instructeur SMA au club49 Babylone.