Avertissement préalable : cet article décrit 3 kihon pour des pratiquants de karaté qui souhaitent remettre l’accent sur les techniques de self-défense. Si vous n’êtes pas karateka, ces enchaînements n’ont pas besoin de suivre ce formalisme technique (linéaire, position plus basse que normale, poing en garde, etc.). Et n’oubliez pas, Karate ne veut pas dire borné.

Les arts martiaux traditionnels prennent parfois des chemins qui les éloignent d’une de leur raison d’être : développer la capacité à se défendre (en dehors du « dojo »). Les chemins sportif ou de développement personnel sont des chemins honorables, mais je me dis qu’il y a de la place pour remettre des enseignements de pure self-défense au coeur des cours « traditionnels » et du travail de base. Et c’est assez facile, car les arsenals techniques de la plupart des arts martiaux possèdent bien évidemment toutes les techniques nécessaires pour cela… il faut juste les ressortir du coffre rangé dans le grenier poussiéreux où elles ont été mises par oubli, par flemme, par mode, par inadéquation aux règles de sécurité, par aseptisation des cours, par inculture… peu importe. Ressortons les techniques efficaces des arsenaux de nos arts martiaux traditionnels !

Cet article s’adresse donc avant tout aux karateka, puisque les techniques présentées utilisent complètement le formalisme technique et padagogique du Karaté, notamment via le Kihon, la répétition de techniques « de base » (ou pas), dans sa forme la plus habituelle : des allers-retours de répétitions techniques. Les Kihon peuvent parfois figurer des enchaînements de combat logiques (c’est souvent le cas). Ici ce ne sera le cas que partiellement, l’enjeu étant plutôt de ressortir et remettre sur le devant de la scène, le travail de techniques pas assez usitées.


Voici donc 3 « kihon » de karaté orienté self-défense, et chacun a des objectifs différents.

1 – « 9-VRM-UCHI », pour l’entraînement générique « VRM »

Kihon en 9 temps, 3×3 pas.

Départ kamae jambe gauche classique (gedan barai, en zenkutsu-dachi ou fudo-dachi, ou bien moto-dachi voire sanchin-dachi si l’on veut se rapprocher d’une position plus pragmatique)

1. yori-ashi (bond vers l’avant), hidari jodan tate-enpi, suivi sur place par (hidari) jodan tettsui-uchi, migi (gyaku) jodan nukite-uchi (viser les yeux [Vision])
2. ayumi-ashi (pas vers l’avant), migi jodan tate-enpi, suivi sur place par (migi) jodan tettsui-uchi, hidari (gyaku) jodan hiraken-uchi (viser la gorge [Respiration])
3. ayumi-ashi (pas vers l’avant), hidari jodan tate-enpi, suivi sur place par (hidari) jodan tettsui-uchi, migi gedan mae kakato geri (viser le genou [Mobilité]), ramener le coup de pied et reposer le pied à son point de départ

Mawatte

4. yori-ashi (bond vers l’avant), migi jodan tate-enpi, suivi sur place par (migi) jodan tettsui-uchi, hidari (gyaku) jodan nihon-nukite-uchi (viser les yeux [Vision])
5. ayumi-ashi (pas vers l’avant), hidari jodan tate-enpi, suivi sur place par (hidari) jodan tettsui-uchi, hidari (gyaku) jodan haito-uchi (viser la gorge [Respiration])
6. ayumi-ashi (pas vers l’avant), migi jodan tate-enpi, suivi sur place par (migi) jodan tettsui-uchi, migi surikonde (tsugi-ashi, pas chassé) gedan yoko-geri (viser le genou [Mobilité])

Mawatte

7. yori-ashi (bond vers l’avant), hidari jodan tate-enpi, suivi sur place par (hidari) jodan tettsui-uchi, migi (gyaku) jodan ippon nukite-uchi (viser les yeux [Vision])
8. ayumi-ashi (pas vers l’avant), migi jodan tate-enpi, suivi sur place par (migi) jodan tettsui-uchi, hidari (gyaku) jodan mawashi shuto-uchi (viser la gorge [Respiration])
9. ayumi-ashi (pas vers l’avant), hidari jodan tate-enpi, suivi sur place par (hidari) jodan tettsui-uchi, migi gedan mawashi-geri (viser le genou [Mobilité]), poser le pied devant

Mawatte – retour à la position de départ

Dans ce kihon, les principes à intégrer sont :

  • répétition du tate-enpi comme « cover » ou protection universelle pour la plupart des coups à la tête
  • poussée constante sur l’avant (on avance sur chaque blocage)
  • automatisation de l’utilisation de tetsui-uchi (coup de marteau) en mode réflexe
  • variation des cibles VRM (vision-respiration-mobilité, concept ACDS) à chaque pas
  • variété des techniques mains ouvertes pour viser les yeux ou la gorge, variété des techniques de jambes pour viser les genoux

2 – « 8-EMPI-UCHI », pour la révision des 8 coups de coude du Karaté

Kihon simple sur 3 pas, changement de jambe à chaque demi-tour.

Départ kamae jambe gauche classique (gedan barai, zenkutsu-dachi)

1. ayumi-ashi (pas en avant), migi jodan tate-enpi, suivi de hidari chudan mae-enpi, en zenkutsu-dachi
2. tsugi-ashi (pas chassé), migi jodan ura-mawashi-enpi en fudo-dachi, suivi de hidari chudan mawashi-enpi en zenkutsu-dachi (gyaku-hanmi), suivi de migi chudan otoshi-enpi en fudo-dachi
3. en avançant par retour arrière, hidari jodan ushiro-mawashi-enpi en kiba-dachi, suivi de hidari chudan yoko-enpi (avec un léger glissement yori-ashi), suivi de hidari chudan ushiro-enpi en nekoashi-dachi

Mawatte sur place, jambe droite devant pour travailler l’autre côté sur le retour

Dans ce kihon, les principes à intégrer sont :

  • travail de plusieurs positions et déplacements
  • bien distinguer mae-empi (frappe rectiligne directe précise au plexus) de mawashi-empi (frappe circulaire qui « ratisse large »)
  • la dernière technique ushiro-empi peut être donnée en regardant vers l’arrière

3 – « 6-GEDAN-GERI-WAZA », pour la révision de 6 techniques de jambe basses du Karaté

Kihon simple sur 4 pas, changement de jambe à chaque demi-tour.

Départ kamae jambe gauche classique (gedan barai, zenkutsu-dachi)

1. sur place, migi kin-geri (« gedan keage maegeri » avec le plat du pied ; viser les parties génitales), ramener le pied, puis migi gedan mae kakato-geri (viser le genou), poser le pied devant
2. sur place, hidari gedan gyaku-mawashi-geri (viser l’aine), ramener le pied, puis hidari gedan mawashi-geri (viser le genou), poser le pied devant
3. en avançant, gedan yoko-geri (« fumikomi » ; viser le genou)
4. en avançant, chudan hiza-geri (viser les cotes ou les parties, selon le niveau que l’on souhaite travailler)

Mawatte, jambe droite devant pour travailler l’autre côté sur le retour

Dans ce kihon, les principes à intégrer sont :

  • la technique « gedan mae kakato-geri » est notamment pratiqué dans Unsu (1e kiai)
  • la technique « gyaku-mawashi-geri » démarre comme un mae-geri et bifurque circulairement vers l’extérieur pour viser les parties ou le genou, c’est un technique assez peu pratiquée en karaté
  • le gedan yoko-geri est en revanche une technique très courante (e.g. les 2 kata Bassai)
  • pour le hiza-geri, bien passer la hanche et aller cherche la cible loin (cf. Heian Yondan)

Merci à Pierre Damoiseau (ECK) pour sa confiance et son support indéfectible (c’est lui le premier à m’avoir transmis la passion des arts martiaux) et de m’avoir demandé de faire un cours « karaté orienté self » dans son club, il y a quelques semaines. C’est ce cours qui m’a donné l’idée de ces kihon. Salutations à Jean-Marie Granouillet à qui j’ai alors (très très ponctuellement) piqué la place pendant qu’il arbitrait alors les CM à Dubai, et dont les bunkai self m’impressionnent à chaque fois. Merci à Sadek Mazri pour sa confiance et ses cours dans l’historique « Dojo 5 » et à Benjamin Gabay pour me laisser ponctuellement sa place pour tester ces kihon avec les élèves du dojo.

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Un commentaire

  1. On me signale le kata Hiji Ate Go Ho, en Shito-Ryu, qui rassemble aussi pas mal de coups de coude : https://dynamicshitoryukarate.com/product/hiji-ate-goho-poster-by-sensei-tanzadeh/

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