Les « GPB » (gilets pare-balles) sont à la fois mythe & mystère : tout le monde connait mais peu connaissent vraiment. Peu de gens connaissent vraiment car le monde des munitions est complexe et car les niveaux de protection sont peu parlants. J’ai pensé qu’un article de vulgarisation pourrait avoir de la valeur ajoutée pour les lecteurs du blog. Les spécialistes relèveront quelques imprécisions ou oublis, normalement pas d’erreur — j’ai volontairement fait synthétique pour rendre accessible le sujet à une audience large.

Minimum à connaître sur les munitions

– côté armes de poing, les revolvers sont souvent en .38* ou en .357* (et peuvent aller jusqu’au .44* voire .50* ; le qualificatif Magnum adossé à une munition signifie une charge plus importante de poudre) et les pistolets souvent en 9mm ou en .45* (aux US, le .40* est courant)
– côté fusils d’assaut, les calibres les plus courants sont le 5,56 OTAN (permettant de tirer la munition .223* Remington) pour le FAMAS français et le fameux M4 (M16) américain, le 7,62 Russe pour la très célèbre Kalashnikov (AK47), et le 7,62 OTAN (munition .308 winchester) pour les FAL, M14, SIG 751, AR10, etc.
– côté fusils d’assaut, le diamètre de l’ogive est donc assez petit, la charge de poudre supérieure (ce qui confère à la balle une vitesse souvent 2 à 3 fois plus rapide que pour une arme de poing), et donc la pénétration beaucoup plus forte que pour une arme de poing
– côté armes de chasse & fusils à pompe, la munition est souvent en « calibre 12 » (18,5mm de diamètre) et son contenu peut être très varié (chevrotine de différents grains, Brenneke ou « slug » quand la cartouche ne contient qu’un seul projectile)
– malgré ces généralités, il existe des centaines de munitions différentes, variant de diamètre, de poids de l’ogive, de charge, etc. Pour aller plus loin, un des ouvrages de référence sur les munitions est le Malfatti
* (diamètre de l’ogive en pouce ; 1 pouce = 2,54cm)

Minimum à connaître sur les niveaux de protection balistique

– il existe plusieurs standards balistiques qui peuvent permettre de mesurer le niveau de protection d’un GPB
– le standard le plus connu est le standard américain NIJ (National Institute of Justice) et est composé des niveaux IIA, II, IIIA, III et IV. Vous pouvez retenir :
– les niveaux IIA et II arrêtent certaines balles d’armes de poing, considérez ces niveaux comme désuets
– le niveau IIIA arrête la majorité des munitions d’armes de poing, y compris les plus fortes (.44 Magnum par exemple)
– les niveaux III et IV permettent d’arrêter certaines munitions de fusils d’assaut, ainsi que les Brenneke ; le niveau III permet d’arrêter des munitions blindées standards (noyau en plomb), alors que le niveau  IV stoppe les balles dites perforantes (pointue avec noyau acier)
– certaines entreprises productrices de GPB créent parfois leurs propres niveaux intermédiaires (III+, III++, IV+, etc.)

Minimum à connaître sur les GPB (gilets pare-balles)

– un gilet pare-balles souple est, à ce jour & niveau de technologie, au plus de niveau IIIA ; il n’arrêtera donc jamais une munition de fusil d’assaut
– un gilet pare-balles souple simple ne protège en général pas des attaques au couteau (un coup d’estoc traversera la couche pare-balles), sans l’ajout d’un insert spécifique anti-couteaux
– pour protéger d’un fusil d’assaut, il faut des plaques dures (inserts additionnels) dites « plaques balistiques »
– il est possible d’ajouter ces plaques par dessus son gilet souple IIIA (c’est le concept ICW, « In Conjuction With »), grâce à un gilet porte-plaques (en anglais « plate-carrier » ou « armor-carrier »), pour atteindre le niveau III ou IV ; pendant des années, la référence de porte-plaques était le CIRAS de la marque Eagle – ce modèle a depuis été largement copié, amélioré… des marques comme Crye Precision ou TYR Tactical propose des systèmes désormais encore plus évolués
– il est aussi possible de ne porter qu’un gilet porte-plaques équipés de plaques dite « stand alone » et protégeant à elle-seule le porteur dans un niveau III ou IV
– les plaques dures couvrent moins le corps qu’un gilet souple ; une plaque stand-alone est en général plus lourde qu’une plaque non stand-alone ; une plaque IV est en général plus lourde qu’une plaque III ; la capacité « multi-impact » d’une plaque n’est pas un élément constitutif de son niveau standard de protection, c’est donc un point supplémentaire à vérifier
– certains gilets pare-balles disposent d’une plaque anti-trauma ayant pour objectif d’absorber une partie du choc de l’impact ; il ne faut pas confondre cette petite plaque fine avec une plaque balistique bien plus épaisse & massive
– les matériaux fréquemment utilisés pour les gilets souples sont le fameux Kevlar® (fibres d’aramide), ou des dérivés comme le Twaron®, le GoldShield®, ou des produits à base de PolyEthylène comme le Dyneema®
– les matériaux fréquemment utilisés pour les plaques balistiques sont la céramique (de différents types), le PE (PolyEthylène), l’acier pur, etc.
– la détention de gilet pare-balle souple, de porte-plaques, et de plaques balistiques personnelles est libre en France (et dans la plupart des pays) ; l’acquisition reste toutefois plus compliquée (certains revendeurs demandant par précaution une carte professionnelle de crainte de vendre du matériel qui serait ensuite utilisé dans un casse)

En photo,
– à gauche, un gilet pare-balles souple IIIA de marque SecondChance, avec plaque anti-trauma
– à droite, un porte-plaques Blackhawk, équipé de plaques de niveau IV, par-dessus le gilet souple ; à noter la poignée ici sur l’épaule gauche, permettant de dégrafer tout le gilet en urgence

Merci à Terräng pour les essais de plaques, et à YannC pour les corrections sur cet article sur les gilets pare-balles

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28 Commentaires

  1. quelques précisions :
    -en calibre d’armes de poing, ne pas oublier le 22 lr et le 7,65, qui restent deux calibres très courants en europe.
    -la norme NIJ est une norme américaine.Elle fixe des normes de tolérance sur le cône d’enfoncement arrière (terminologie balistique) toléré. Aux USA, cette tolérance est de 40 mm. C’est-à-dire qu’il est admis que la structure du GPB puisse se déformer de 4 cm vers l’arrière. Cela laisse imaginer les traumatismes que peut provoquer l’impact (fracture des côtes, pneumothorax, éclatement du foie ou de la rate, hémorragie interne…). En france, le cône d’enfoncement arrière toléré est de 25 mm. Tout simplement parce que les gabarits moyens ne sont pas identiques. En clair, plus votre masse musculaire est importante, plus vous avez de chances d’avoir un trauma moindre. D’où la pratique assidue de la musculation du haut du corps chez les policiers us.
    -un GPB n’arrête pas (au sens de stopper)une ogive. Ce serait d’ailleurs une catastrophe traumatologique. Le but est de déformer le projectile et de répartir l’énergie cinétique sur l’ensemble de la structure du GPB. Il est donc impératif que la structure se déforme. A noter que le GPB est conçu pour « stopper » UN SEUL impact.Déformée par le premier impact, la structure ne résistera pas au second, ni à un tir en cpc (coup par coup rapide) ou en rafale (glock 18 par exemple).
    -si le GPB n’arrête pas les coups de couteau, il sera néanmoins une protection supplémentaire, puisque constituant une épaisseur de plus à traverser pour la lame.
    -au dernier salon milipol, la firme dyneema a présenté une fibre encore expérimentale dont les performances devraient révolutionner le domaine.

  2. Dans la lignée du commentaire d’aramis sur les effets des déformations arrières:
    il est impératif que toute personne ayant reçu un impact sur son gilet et qui ne présente pas ou peu de blessures apparentes (hématome ) face l’objet dans les plus brefs délais d’une radio/échographie de contrôle pour détecter une hémorragie interne en cours.

  3. De nouveaux design permettent d’atteindre des niveaux IV(+) avec de faible épaisseurs de céramique et une relative légèreté, je pense au DRAGONSKIN.
    Il y a aussi des recherches chez Dupont il me semble sur des GPB en soie d’araignée.

  4. Geo de Grenoble

    Quel est le poids des gilets PB ? (avec et sans plaques). S’ils sont trop lourds, cela peut handicaper pas mal les forces de l’ordre notamment en cas de poursuite d’un suspect à pieds.
    Aux USA un certain nombre de suspects parviennent à s’enfuir car les policiers, alourdis par leur équipement (gilet et arme de service) ne courent pas assez vite.
    La pratique excessive de la musculation du haut du corps n’améliore pas les choses… 😉

  5. @Geo
    il y a un choix a faire…rattraper le suspect ou sauver sa peau…Le choix est vite fait ! Dtoute façon, avec ou sans GPB, le poids du reste de l’équipement alourdit tellement que les chances de rattraper à la course un type en jeans/baskets (qui lui sait qu’il va tenter de s’échapper. Le flic ne le sait pas. 1er temps de retard…) sont limitées.
    Je n’ai pas parler de pratique excessive. Il ne s’agit pas de se bodybuilder !La pratique d’une musculation adaptée (type crossfit par exemple) est un facteur de bonne condition physique et de protection dans l’intervention pour le policier ou autre pro de la sécu.
    D’autre part, il faut mettre fin à cette légende de la muscu facteur de ralentissement du mouvement. C’est une légende tenace, contredite par tous les spécialistes de la préparation physique. Preuve en est qu’aucun sport (même le golf…) n’échappe à la pratique de la muscu. Au contraire de cette affirmation, la musculation augmente la vélocité, l’explosivité, la puissance, donc la vitesse.

  6. @MAC:
    c’est un peu le soucis avec ce type de matériel, pour vendre les industriels du secteur trouvent toujours LA nouveauté, année après année pour maintenir la demande MAIS quelle est la fiabilité de ces nouveaux produits ?
    Il y a d’ailleurs une grosse polémique sur dragonskin et son efficacité réel .
    on est pas loin des prothèses PIP 🙂 parce que les tests NIJ ils ont lieu 1 fois dans un beau labo bien propre et avec des échantillons préparés aux petits oignons par le staff technique de l’industriel mais quid de la production de série ???
    J’ai vécu l’arrivée du spectra sur le marché.
    RHaa !!!!! le spectra !
    je connais un groupe qui a remué ciel et terre pour avoir des plaques dans ce matériau révolutionnaire à l’époque éh oui il résistait à l’eau (par rapport au kevlar !) donc wonderfull !!!!le kevlar était mort et quoi ???
    Ben le spectra, le feu il aime pas trop alors que le kevlar il résiste très bien.
    Donc retour au kevlar !
    Tempête dans un verre d’eau.
    Par contre le dyneema a été une vrai avançée ! ou encore les poignées de largage d’urgence sur les modèles de combat.
    Comme beaucoup de chose, il faut avoir 3 à 5 ans de recul sur une technologie pour savoir si elle marche vraiment !
    Dans cet esprit le M16 (M4) américain commence à être un système d’arme valable après 40 ans de modifications diverses.

    De nos jours ,le kevlar, on a un bon recul dessus (commercialisation 1972), le spectra intervient dans les gilets mais dans des compositions multi-matières, le dyneema marche bien aussi .

    On sait ce qu’on peut faire ou non avec ! et ça c’est fondamental pour nous.

    ET puis il y l’accès au dit matériel ! (admin sait que c’est mon cheval de bataille !)
    Exemple : je veux un « SUPERGOLDFLEXULTRA6000 » 🙂
    OK ! et…pas d’importateur en france! comme d’hab mais le marché est tellement minuscule.
    Alors comme je suis un malin, je le commande aux US ah oui mais il faut un doc du state département US du genre DSP 93 visé par le FBI, le HOMELAND etc…
    C’est pas gagné !

  7. Geo de Grenoble

    @Aramis
    De tout temps les armées ont eu des fantassins « lourds » et « légers ». Ces derniers sacrifiant le niveau de protection et d’armement pour une plus grande mobilité.
    Le but d’une force de police n’est il pas de pouvoir se déployer rapidement ?

    Avons nous des statistiques des professionnels des forces de l’ordre ayant réellement été « sauvés » par leur GPB ?

    Autre question : lors de lorsqu’on appréhende un suspect « remuant »… le GPB est-il un plus (en terme d’impact physique et de protection) ou au contraire un handicap (gestes plus lents et limités) lors d’un combat rapproché ?
    Existe t’il des techniques de combat spéciales prenant en compte le GPB ?

  8. la comparaison avec les armées n’est pas valide. Le contexte d’intervention est différent.
    Si les forces de l’ordre (police, douanes, gendarmerie) utilise des GPB souples, c’est bien dans l’esprit du compromis protection/mobilité afin de ne pas nuire outre mesure à la vitesse d’intervention. Sur une intervention, il est de toute façon hors de question de sacrifier la sécurité du personnel à la rapidité de l’intervention.
    Votre deuxième question est un non-sens. Ca revient à poser la question de savoir combien d’automobilistes ont été sauvés par l’abs ou l’esp.
    Le port du GPB ne pose pas de difficultés majeures de mobilité lors des interpellations. Il présente effectivement une protection non négligeable aux impacts de l’adversaire (j’en ai fait l’expérience) et protège des chocs, notamment sur chute.
    Il n’y a pas de techniques particulières de combat liées au port du GPB. Ce n’est pas nécessaire. Il suffit simplement de prendre l’habitude de s’entraîner avec.

  9. autre précision importante :
    -un GPB souple se porte au plus près du corps, comme une seconde peau. Le seul vêtement qui doit se trouver entre la peau et le GPB est un tee-shirt imper-respirant.
    Un espace trop important entre le GPB et le corps crée un intervalle qui va considérablement augmenter la déformation arrière de la structure du GPB.
    Trop de fonctionnaires portent leur GPB sur plusieurs couches de vêtements, se mettant ainsi en danger.

  10. En tant qu’utilisateur, je me pose le question de la durée de vie d’un GPB et de ses plaques balistique. A ce jour je n’ai pas réussi à obtenir de réponse précise. Et l’administration ne communique pas sur ce point.

  11. @ bouba :
    Nous ne pouvons pas nous substituer à ton administration concernant les caractéristiques de ton matériel de dotation cependant :

    quelques éléments de réponse généralistes :

    -d’abord voir sur l’étiquette (en général en face interne du pack dorsale) la date de fabrication du pack balistique.
    -la durée de vie est en général de 5 à 8 ans pour le kevlar (selon plusieurs fabricants israéliens) ,car il se dégrade dès sa sortie de la machine de fabrication, est sensible aux UV et à l’humidité donc selon le stockage et sa « vie » active (port journalier de jour,de nuit, en été, en hiver) sa durée se réduit.
    -le dyneema irait vers les 10-12 ans mais j’ai moins d’infos.
    Par exemple la gendarmerie nationale est en train de mettre en place le changement des gilets discrets en dotation (8 à 10 ans selon les lots)
    Voir par ailleurs notre test il y a peu dans ce blog, sur un gilet GK modèle commerciale ayant été porté de manière intensive et qui à très bien résister malgré + de 10 ans d’age.

  12. Un carnet de chèques fait office de pare-balles. Difficile d’y croire et pourtant :

    http://www.sudouest.fr/2012/01/10/la-vie-sauve-grace-a-son-carnet-de-cheques-600447-2780.php

  13. Échanges intéressants et instructifs et de bonnes qualités.

  14. Suite aux évènements tragiques et terrifiants survenus à Paris durant les derniers 12 mois, ici au Canada nous partageons vos peines et vos craintes dans ces moments si difficiles à supporter.

    Du point de vue équipement de protection personnelle, en 2015, il y a des nouveaux boucliers pare-balles innovateurs, légers (3kg) et portables, qui sont complémentaires aux vestes. Un exemple est le Cop Shield (www.copshield.com), qui sera fabriqué au Québec en 2016. Le 1er modèle Cop Shield est le NIJ Level 3A. Il sera suivi du Level 3 et ensuite du Level 4. Il serait souhaitable et opportun que les forces policières françaises prennent connaissance de ces nouveaux produits afin de rehausser la protection des policiers et policères en devoir, qui risquent parfois leur vie pour protéger la sécurité de tous les citoyens.

  15. Alexandre Michelland

    Pouvez vous m’indiquer a quoi correspondent les références des pack balistiques ex. 2M, 1L, etc? Je pense que la lettre correspond à la taille classique d’un vêtement de type polo ou t-shirt mais à quoi correspond le chiffre?

  16. Jean-Philippe GIRIN

    Bonjour je travaille dans une boîte de sécurité et on me demande de porter le gilet pare balle ai je le droit de demander une prime de risques ?

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